Avec la digitalisation du paiement des amendes liées aux infractions routières, les automobilistes vont récupérer leur permis de conduire, leur carte grise ou assurance sans être obligés d’aller au Commissariat de police ou à la Brigade de gendarmerie. Pour l’Etat, il y a aussi un meilleur suivi du traitement et la collecte des fonds gérés par le régisseur.
Rien ne résiste à la digitalisation, car l’un des derniers bastions, qui résistait encore à sa poussée fulgurante, va tomber : une plateforme de paiement digitale des amendes forfaitaires liées aux contraventions routières est mise en place. La cérémonie de lancement a eu lieu hier, dans les locaux du Trésor public. Désormais, les usagers de la route n’éprouveront plus le besoin d’aller à la gendarmerie ou au commissariat pour payer une contravention. Ils pourront maintenant s’en acquitter directement sur les plateformes mobiles et par carte bancaire.
Ce projet, initié par l’Etat du Sénégal et mis en œuvre par la Direction générale de la comptabilité publique et du trésor, en partenariat avec la Gendarmerie nationale, la Direction générale des transports terrestres et la Police nationale, présente de nombreux avantages, notamment le gain de temps pour les automobilistes. « Ce projet s’inscrit dans le cadre de la modernisation de l’Administration publique et de l’amélioration de la qualité des services rendus aux usagers. Dans le système antérieur, vous pouvez faire une infraction ici et aller faire des kilomètres pour payer et revenir prendre votre permis. Dans ce système, on vous permet par tous les moyens de paiement agréés par la Banque centrale de l’Afrique de l’Ouest de payer sur le lieu de commission de l’infraction et de repartir avec vos papiers, c’est plus simple, c’est plus transparent et ça donne un gain de temps énorme », explique Cheikh Tidiane Diop, Directeur général de la Compétitivité publique et du Trésor. Cette innovation va aussi assurer plus de fiabilité dans la gestion des finances collectées grâce à ces amendes. Il ajoute : « Au-delà de l’économie budgétaire qui n’est pas négligeable, parce que dans l’ancien système, l’Etat du Sénégal commandait énormément de carnets, qui ne donnaient pas tous les gages de fiabilité et qui demandaient des moyens budgétaires assez consistants et des moyens de conditionnement et de conservation qui présentaient un certain facteur de risques. »
D’après lui, « ce projet va participer, au-delà de la simplification et de la transparence, à l’amélioration de la collecte des ressources. Ce projet va contribuer aussi à la normalisation des relations entre les transporteurs, les usagers de la route d’une manière générale et les forces de police et de gendarmerie, parce que le système est paramétré sur les différentes typologies d’infractions, et à chaque type d’infraction, le montant de l’amende est également embarqué ».
Cette digitalisation présente des avantages pour l’usager qui peut effectuer le paiement rapide sur place et récupérer immédiatement son permis de conduire, sa carte grise ou son assurance. Pour l’Etat, il y a une célérité dans le traitement et la collecte des fonds gérés par le régisseur. Il y a aussi une amélioration de l’efficacité et la traçabilité des paiements. Même s’ils magnifient ce projet qu’ils ont porté comme revendication auprès du président de la République en 2021, les syndicalistes pointent quelques imperfections au niveau du logiciel. « Il y a quelques manquements que nous avons observés. D’abord, le taximan qu’on vient de contrôler tout à l’heure à la Patte D’oie, on lui a fait payer 6000 F pour une contravention de 3000 F, donc ce sont des manquements. Pour nous, on doit inclure le barème forfaitaire dans la plateforme, pour que, quand on interroge la machine sur telle infraction, automatiquement la somme que nous devons payer s’affiche. Cela va nous permettre de savoir l’infraction qu’on a commise et la somme qu’on doit payer. L’infraction sur le défaut de port de ceinture, c’est à 3000 F, et si c’est 6000 F qui sont inclus dans la plateforme, ça mérite d’être rectifié. Ce n’est pas conforme au barème de contravention », relève Fallou Samb, Secrétaire administratif du Cadre unitaire des syndicats des transports routiers du Sénégal. Il insiste : « Si par exemple, vous payez et on envoie l’amende forfaitaire par Sms, est-ce que tous les chauffeurs ont à leur portée des portables ? Et la réponse, c’est non ! Je peux conduire mon véhicule sans avoir un portable. » Il admet que cette innovation permettra d’éviter les longues files d’attente devant les bureaux de contravention.
Le Directeur général du Trésor, qui assure qu’il s’agit d’un projet-pilote qui ne couvre que pour le moment la région de Dakar, annonce des évaluations dans quelques mois pour améliorer l’algorithme. « A l’issue de cette évaluation, nous passerons à l’échelle, c’est-à-dire que nous allons le déployer au niveau national, et l’intérieur du pays sera couvert, et ce projet que je qualifierais de première phase, d’un projet plus englobant qui est le projet Capp Karangë, l’autre version de ce nous sommes en train de faire, en termes de prévention, de sécurité routière », a -t-il promis.
Justin Gomis
(Source : Le Quotidien, 19 janvier 2024)