Flutterwave, la fintech nigériane, vient d’obtenir deux décisions de justice favorables lui permettant de récupérer des fonds indûment transférés de ses comptes. Ces épisodes soulignent néanmoins des marges de progression dans le renforcement des procédures KYC (Know Your Customer) dans un Nigéria où les paiements sont en croissance.
Flutterwave, entreprise majeure du secteur des fintech africaines, a récemment obtenu un jugement favorable de la Justice nigériane. Celle-ci ordonne à des banques la restitution de 1,9 million $ « indûment perçues » à partir des comptes de ses clients locaux en février 2023.
Cette décision fait suite à une première rendue début février 2024, autorisant le recouvrement de 24 millions de dollars suite à des transactions frauduleuses effectuées en octobre 2023.
Bien que les détails de ce second jugement restent confidentiels, cette affaire pose des questions cruciales sur la régulation des fintech en Afrique, mettant en exergue les enjeux de cybersécurité, de connaissance des clients et les complexités juridiques du secteur. Flutterwave, présente dans plusieurs pays du continent, affirme avoir réagi promptement en février 2023, lors de la détection de ces « transactions suspectes ». Suite à cela, 127 comptes répartis dans 27 banques ont été saisis.
Néanmoins, selon des témoignages rapportés par le site d’information Techcabal, certains clients propriétaires de ces comptes bancaires disent ignorer le caractère frauduleux des fonds reçus, et ne pas comprendre la saisie opérée sur leurs avoirs. Ce genre de situation risque de se multiplier, avec l’adoption grandissante des paiements électroniques au Nigeria, confronté à une pénurie d’argent liquide.
D’après la Banque centrale du pays, les transactions effectuées par les terminaux de paiement ont doublé en 2022 par rapport à l’année précédente, atteignant 20% du PIB. Ce contexte amplifie l’importance de sécuriser les paiements digitaux. Pourtant, dans le même temps, la fraude liée à ces terminaux augmente, selon des faits rapportés par des médiaux locaux. Les banques sont strictement encadrées, et la récupération des 1,9 million $ peut être facile.
Mais pour les transactions effectuées avec des sociétés de paiement comme Opay, Moniepoint ou PalmPay, la capacité à retracer et identifier les bénéficiaires réels sera testée, notamment dans la campagne visant à récupérer 24 millions $ indument transférés à près de 6000 bénéficiaires, dont plusieurs ayant probablement déjà dépensé ces fonds. Consciente des risques, l’entreprise ayant levé 506 millions de dollars auprès d’une cinquantaine d’investisseurs, intensifie ses efforts de conformité pour accompagner sa croissance.
Elle a procédé en décembre 2023 au recrutement d’experts internationaux, qui ont notamment fait leur preuves chez Paypal, ou encore Western Union. Dans un Nigeria largement informel, où la traçabilité demeure un défi, la cybersécurité restera un enjeu clé des services de paiement numériques, en dépit des investissements dans l’identification des clients.
(Source : Agence Ecofin, 13 février 2024)