À l’approche de l’échéance du 30 avril, date butoir pour le réenregistrement des cartes SIM, nombreux sont les utilisateurs de l’application de paiement mobile Juice qui s’agitent face à la réglementation 23 de l’Information and Communication Technologies (Registration of SIM) entrée en vigueur le 1er octobre 2023, conformément aux recommandations du rapport de la commission d’enquête sur le trafic de drogue.
Visiblement, ils font face à un choix cornélien : réenregistrer leur carte SIM, incluant la photo, avec les risques, voire la perception que tous les appels, messages et autres conversations seraient enregistrés ou refuser carrément de souscrire à cette directive, en sachant toutefois que leurs cartes seront automatiquement désactivées et qu’ils ne pourront en conséquence avoir accès à certains services bancaires via leurs portables.
Dans les milieux bancaires, on suit la situation de près vu que l’enjeu est de taille avec des centaines de milliers d’utilisateurs qui ont recours à ce mode de paiement par smartphone. « Le mobile payment représente un segment important de leurs opérations », souligne un spécialiste financier sous le couvert de l’anonymat. Du coup, tout doit être fait pour s’assurer que ce service ne souffre pas sur fond de polémique, voire de controverse liée à cette réglementation de l’ICT Authority.
À cet effet, le message de la MCB encourageant les utilisateurs de l’application Juice, par le biais de leur smartphone, à réenregistrer leurs cartes SIM pour pouvoir bénéficier de ce service a suscité de vives réactions, même si on peut comprendre que c’était dans une démarche d’information. Or, certains l’ont vu comme un moyen de pression pour faire le jeu des autorités qui veulent aller jusqu’au bout, bien qu’il existe encore plus d’un million d’abonnés qui n’ont pas encore fait le pas, convaincus qu’il y aurait peut-être un stay of execution par rapport à la plainte déposée par l’avoué Pazhany Rangasamy.
Au service de com de la MCB, personne n’a souhaité répondre à nos interrogations suivant le courriel soumis le 10 avril avec des questions précises sur l’impact de la décision de l’ICTA sur l’application Juice. Il nous a fait savoir que le responsable n’était pas disponible pour répondre à ces questions et que le délai était trop court.
Avec presque 400 000 utilisateurs de l’application Juice, la MCB reste de loin l’un des leaders dans le créneau du paiement mobile. Cependant, la question qui se pose aujourd’hui est celle-ci : si la carte SIM d’un abonné est désactivée, pourrait-il prendre avantage des services de paiement mobile comme Juice, my.t money, maubank withme ou d’autres applications proposées par des banques et certaines institutions ? Oui et non, souligne un spécialiste du secteur bancaire. « Si une banque envoie un OTP (one-time password) à travers un SMS suivant une transaction bancaire, pour authentifier son utilisateur, il faut que ce dernier ait un portable muni d’une carte SIM activée. C’est aussi simple que ça car au cas contraire, il ne pourra pas accéder aux services de paiement mobile. »
Toutefois, certaines banques trouvent que ce n’est pas la fin du monde si un client a sa carte SIM désactivée. Il existe d’autres options comme l’envoi de l’OTP via l’e-mail à l’issue d’une transaction. C’est le cas pour Absa Bank qui, selon Jennifer Johnson, Head of Marketing and Corporate Relations : « Les clients peuvent utiliser leur smartphone pour des transactions par le biais de l’Internet Banking, sans avoir besoin d’une carte SIM. Notre système OTP offre l’option d’envoyer un SMS par e-mail. »
Idem pour Bank One, où un client qui ne peut accéder au service Mobile Banking sur son téléphone, pourra néanmoins utiliser la plateforme Internet Banking via une connexion Wi-Fi. « Nous encourageons fortement nos clients à s’assurer que leurs données personnelles telles que nom, adresse, e-mail ou numéro de téléphone soient maintenues à jour, de façon à bénéficier pleinement des services offerts à travers nos canaux digitaux », explique son Chief Operating Officer, Eric Hautefeuille.
Et d’ajouter que si un numéro de téléphone est désactivé ou alloué à un tiers, les communications de la banque vers son client ne lui seront pas transmises et cela peut empêcher certaines transactions bancaires nécessitant les validations de code OTP envoyé par SMS. Entre les transactions sur mobile avec une carte SIM activée et un code via SMS ou l’Internet Banking, le choix final revient aux clients.
Villen Anganan
(source : L’Express, 11 avril 2024)